Un éditorialiste bien connu écrivait, formel, voici 13 ans : « Chaque parti aura son RDR ». La naissance du parti de Djény Kobena avait suscité, on le sait, beaucoup d’émotion. C’est un PDCI furibond qui avait assisté, impuissant, à l’avènement d’une formation issue de ses rangs. L’émoi des partisans de Bédié était d’autant plus grand qu’Houphouët lui-même, père et repère du vieux parti, leur avait certifié, en son temps, que la bande à Djény – les rénovateurs – n’était qu’une « guilde » de pauvres troubadours, rien de très consistant, des feuilles mortes, comme on dirait aujourd’hui ! « Ils n’ont rien et puis, ils veulent rénover quoi ? » avait ri, de son rire sacerdotal, l’apôtre de la paix. Et puis les feuilles mortes, comme elles savent bien le faire, avaient fini par bruler la politesse à la vieille assemblée, allumant un terrible feu de brousse dans le cœur des adorateurs des petites rivières.
Je n’aime ni les oracles, ni les prédictions des officiants non-consacrés et Béhanzin a radicalisé en moi la tendance. Mais il me plait, toutefois, d’interroger les ressorts et la portée de certaines révélations, pour peu qu’elles respectent un minimum de forme.
J’ai ainsi le sentiment que « Chaque parti aura son RDR » ramenait, en premier lieu, et presque de toute évidence, à la notion de scission. Aucune formation politique, devrait-on comprendre, n’échapperait aux ruptures. Quoi de plus normal ? Départs et venues ne s’inscrivent-ils pas dans le cours ordinaire de la vie ? Ne participent-ils pas à l’existence et à l’expression démocratique ? Liberté d’association, liberté de rupture, liberté de parole, liberté de silence ? Mais scission dit aussi dissidence. Et c’est à niveau que les susceptibilités sont des plus vives : la présence du dissident, à elle seule, révèle que le parti a viré à la partie. Elle divulgue aussi l’ « arrêt » du mouvement, là où le parti avait mandat permanent de dépasser contradictions et antagonismes, pour ne pas être dépassé, c’est-à-dire, inscriptible au registre de la sclérose.
S’il est vrai que chaque parti est appelé à avoir son RDR, l’Alliance pour la Nouvelle Côte-d’Ivoire (ANCI) est certainement le RDR du RDR ! Or qu’aura été le RDR à ses origines, sinon que le parti d’un mentor embusqué ? Conter le Rassemblement Des Républicains reviendrait à révéler le parcours d’une formation venue au monde autrement que par la tête. On le sait, le RDR n’a jamais montré de figure qu’après en avoir fini avec les dents de lait. « Quand je frapperais, tu tomberas » était loin d’être le propos d’un poupon, quoique de nos jours existent des nourrissons capables de vous dire, les nom et prénom, en leur titre et qualité, des plus hautes personnalités. Une chose est sûre, le jeune Gonhi Hervé, qui n’a que deux ans, n’était pas encore né en 1999, quand d’autres bébés, d’engeance querelleuse, montraient la tête.
Que l’ANCI soit le RDR du RDR nous fonde à penser que ni son actuel président, ni son présent Secrétaire Général, n’en révèlent le vrai visage. C’est que, à l’image de tout « RDR » qui se respecte, ce parti doit garder à l’abri de nos regards impudiques, un mentor tapi dans l’ombre – des feuilles (mortes) – attendant que prenne fin l’automne, le printemps étant toujours à venir. Qui sait ? Les feuilles, même flétries, sont quelquefois annonce de fruits.
Que l’ANCI soit le RDR du RDR nous fonde à penser que ni son actuel président, ni son présent Secrétaire Général, n’en révèlent le vrai visage. C’est que, à l’image de tout « RDR » qui se respecte, ce parti doit garder à l’abri de nos regards impudiques, un mentor tapi dans l’ombre – des feuilles (mortes) – attendant que prenne fin l’automne, le printemps étant toujours à venir. Qui sait ? Les feuilles, même flétries, sont quelquefois annonce de fruits.
Permettez-moi d’être paranoïaque : et si l’ANCI était le parti de Soro Guillaume ? « Il est brillant et courageux. C'est un jeune homme qui a beaucoup d'avenir. Depuis deux ans, je l'ai observé dans ses fonctions de responsable des Forces nouvelles. Je pense qu'il peut apporter beaucoup à la construction de la Côte d'Ivoire, une fois la paix revenue » disait dans l’édition du 9 janvier 2005, au micro Marwane Ben Yahmed, de l’hebdomadaire Jeune Afrique l’Intelligent, Dramane Alassane.
Le jeune « brillant et courageux » aurait-il décidé d’apporter de l’eau au moulin de son dévoué admirateur ? L’avenir nous le dira. Pour l’instant l’heure est à la diabolisation insidieuse des têtes affichées de l’ANCI. L’on les avait déjà qualifiées de « Feuilles mortes » ou de bêtes transhumantes, aujourd’hui il est question de stigmatiser en eux félonie et mensonge. Les « ANCIens », nous suggère-t-on, sont de ceux qui partent sans prévenir. Pour tout dire, ils sont des traitres ou, à tout le moins, des menteurs qui, par leurs mensonges, causent des torts au… mentor. Créer un parti ? Ce n’est pas ce qu’ils avaient dit. Comme si Bédié avait eu droit à un faire-part le 28 septembre 1994.
Si tant est que les « ANCIens » sont des traitres ou des menteurs que penser de l’homme politique qui prétend – dans notre monde saturé à l’internet et aux communications téléphoniques – ignorer le fait que Zémogo Fofana ait créé un parti ? « C’est une façon de parler » me dira-t-on. Mais un tel registre de parole ressemble fort à celui méprisant par lequel nos jeunes sœurs disent à tout contradicteur abhorré « Je ne te vois même pas ».
Une consolation, cependant, pour les partis saignés : chaque RDR aura son ANCI.
La brochette d’artistes drainée par le nouveau parti, est plutôt prometteuse…
La brochette d’artistes drainée par le nouveau parti, est plutôt prometteuse…
Excellences Lectrices, Excellences Lecteurs, de quelles Nouvelles sont porteurs les « ANCIens » ? S’il n’y a rien de nouveau sous le soleil, soyons attentifs à l’avènement des « ANCIens » ! Espérons seulement que, pour cette fois, les fronts emblématiques ne succéderont pas aux traits énigmatiques, dans une tragique éclipse.
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