lundi 24 décembre 2007

Vers un désarmement forcé ?

Lundi 24 décembre 2007, Bouaké, les armes ont encore crépité. Deux jours après le lancement officiel (22 décembre) de l'opération de désarmement, les réticences restent manifestement vives. Mardi dernier, des rebelles, hostiles au chronogramme de Ouaga, avaient déjà tiré en l'air sans recevoir de riposte et sans faire de blessés.
Là où les manifestants avaient évoqué des primes de Tabaski, "primes de savons" non versées et autres prunes, bien d'observateurs avaient plutôt vu un mouvement d'humeur lié à l'incertitude de l'avenir des ex-combattants à l'issue du désarmement.
Vers midi ce lundi 24 les armes sont encorez venues jeter un relatif froid sur l'enthousiasme des adeptes de Ouaga.
Un peu après 15 h 45, un relatif calme est revenu sur la ville de Bouaké où les fonctionnaires et agents de l'Etat recevaient leurs primes d'installation des mains du CNPRA (Comité National de Pilotage du Redéploiement de l'Administration), depuis deux jours.


Les corridors de la villes ont été fermés toute l'après-midi, puis ouverts un peu avant 18 heures ce lundi 24 décembre, mais la situation reste tout de même préoccupante, en raison de l'hostilité supposée des manifestants au désarmement.


La Côte-d'Ivoire va -t-elle vers un désarmement forcé des rebelles ?

samedi 22 décembre 2007

La coopération sous-régionale en marche !


Après le Sénégal et le Bénin qui ont déjà bénéficié de l'expertise ivoirienne en matière de gestion de finances publiques, c'est la Guinée-Bissau qui vient à son tour faire sienne la manne de l'expérience d'un pays frère . Le vendredi 21 décembre 2007, à Abidjan une signature de convention a été, en effet, signée entre les ministres de l’Economie et des Finances de la Côte d’Ivoire, M.Charles Diby Koffi et celui de la Guinée-Bissau, Issufo Sanhan.
Cette convention porte sur le transfert du Système intégré de gestion des Finances publiques (Sigfip), un logiciel ivoirien conçu par la Société nationale de développement informatique (Sndi), pour assurer la transparence et la célérité dans le traitement des opérations financières de l’Etat.

Ce transfert d' "intelligence" permettra d'appuyer la Guinée-Bissau dans sa reforme budgétaire, de réduire les délais de traitement, tout en favorisant la disponibilité d’information financière et économique. Le ministre ivoirien de l'Economie et des Finances a indiqué à l'occasion : « Nous acceptons de coopérer avec votre pays car nous sommes dans le même espace communautaire et nous voulons éradiquer la pauvreté. Nous vous aiderons à assainir vos finances publiques et enverrons dans les premières semaines du mois de janvier 2008, des missions au niveau des Douanes, Impôts, Trésor, Direction générale du budget, de l’Economie, de l’Inspection des finances. La Sndi qui a conçu le Sigfip sera du voyage ».

La relative normalisation de la vie publique en Côte-d'Ivoire, suite à l'accord de Ouagadougou, permet la reprise des activités du leader ivoirien.

mardi 18 décembre 2007

Croyez-vous à la Mère Noëlle ?

Je suis tombé à tout hasard sur ce texte qui intrigue en bien de points. J’ai voulu le partager avec vous...

« Un soir de 24 décembre, veillée de Noël, un groupe d’amis, tous jeunes s’était donné rendez-vous dans un maquis d’Abidjan pour se réjouir. Une très belle femme d’une quarantaine d’années, enceinte d’environs 7 à 8 mois de grossesse, assise toute seule à une table, fit un signe d’invitation au jeune K. d’approcher.
En jeune homme poli, celui-ci s’approcha de la dame pour l’entendre dire qu’elle avait un besoin pressant et urgent à satisfaire dans l’immédiat. Sérieuse, imperturbable, sans honte, elle expliqua qu’elle avait besoin de coucher avec K. et qu’elle le paierait très cher.


Surpris par une telle demande inattendue venant d’une femme enceinte, qui pouvait avoir l’âge de sa mère, le jeune K. marqua sa désapprobation et son indignation et se retira.
L’ami de K. qui avait suivi la scène de loin l’interrogea sur le motif de sa colère. Après l’avoir entendu l’ami se proposa de répondre à la demande de la dame et partit avec elle.

Plus qu’indigné et révolté par cette décision insensée de son ami, K. rentra chez lui, bouillant de colère, abandonnant ses amis et les projets de réjouissances prévus pour cette nuit de Noël.
Trois jours après cette mésaventure, en passant devant la maison de son ami, K. vit une bâche dressée et des chaises. On l’informa que son ami était mort dans la nuit du 24 décembre.

Bien des années plus tard, le Saint-Esprit rappela et expliqua ses faits à K. qui entre temps était devenu serviteur de Dieu.

Cette dame était un démon en chair, venue à la faveur des fêtes de fin d’années dans le monde des vivants pour faire des victimes et particulièrement anéantir K. prédestiné à servir Jésus ; mais Dieu dans sa grâce et sa préscience a suscité en K. le refus afin de le sauver. Cependant l’ami de K. qui était plus faible d’esprit s’était proposé à la mort "cadeau".

Le démon ayant échoué dans sa mission s’est contenté du jeune homme « facile »;

Sache bien-aimé que Dieu dit celui qui s’attache à la prostituée est un seul corps avec elle. Car les deux deviendront une seule chair. 1 corinthien 5v16 ;

Sortir avec une personne autre que son mari ou sa femme légale moyennant ou pas de l’argent est un péché devant Dieu. Si tu ne prends pas garde, tu risques de vivre un cas similaire à celui-ci ou pire.

Aujourd’hui le SIDA fait des ravages incalculables par la contribution de ces démons en chair sortis des tombeaux. Prenant des apparences humaines (qui maitrisent sèment toutes sortes de virus par le biais du sexe) ils viennent en mission pour détruire avec joie les humains avides de plaisirs et de gains faciles.

Jeune fille, jeune homme, si tu fais partie de celles ou ceux qui ont leur carte de visite dans tous les hôtels pour attendre des coups de fil de clients ce message t’interpelle.

Arrête ces pratiques avant qu’il ne soit trop tard. L’issue de cette vie de débauche, de commerce de sexe est toujours la mort.
Car les démons passent d’un corps à un autre pendant le « contact ». Comme toutes les autres maladies transmissibles, ils provoquent la stérilité, l’avortement multiple, mariage avec les esprits etc.

Dieu t’a donné la vie pour que tu en jouisses pleinement et que tu la prolonges jusqu’ à ce que le temps qu’il t’a accordé sur la terre s’accomplisse pleinement et que tu la prolonges dans l’au-delà pour l’éternité.

Ne l’abrège pas par ton ignorance ou ta cupidité ou même pour un simple plaisir éphémère. Que te servira-t-il de gagner toutes les richesses si tu dois souffrir de maladie incurable ou de mourir prématurément sans avoir profité du don Dieu, sans avoir joui de la plénitude de ta vie ?

Jésus-Christ de Nazareth est venu t’avertir à travers ce récit. Il a payé un prix pour que tu sois sauvé de tous ces démons, ces maladies incurables, ces échecs, ces envoutements, ces angoisses, cette pauvreté, ce chômage, cette situation difficile, mais secrète que tu connais, ces malédictions prononcées sur toi.

N’endurcis pas ton cœur par des faux raisonnements. C’est une réalité : ceux qui ont accepté Jésus ont évité bien de pièges du diable. Fais ce pas dès aujourd’hui et sois sous la haute protection de Jésus-Christ de Nazareth. La décision vient de toi seul, personne ne peut la prendre à ta place.

Pour l’année nouvelle, sois inscrit sur le registre du royaume des cieux, pour éviter que le diable ne t’inscrive sur le registre de la morgue. Sois sauvé et béni au nom de Jésus-Christ de Nazareth. Tous les dimanches assiste à un culte chrétien ou appelle le (225) 05 754 354 ou (225) 08 96 06 44, pour tout conseil que tu désires recevoir pour ta vie. Que Dieu te bénisse ».

lundi 10 décembre 2007

Ivoirité ?

" Je sais que vous n'êtes pas le père de l'Ivoirité" aurait dit Sarkozy à Gbagbo à Lisbonne. Cette déclaration qui a l'air d'enthousiasmer les médias gouvernementaux ivoiriens, n'a pourtant rien d'explicite.

Qu'est-ce que Sarkozy entendrait par Ivoirité ? Un slogan fédérateur ou un concept exclusionniste ? La déclaration à Lisbonne s'aparente à une stricte opération de charme, quand on sait que le père reconnu de l'ivoirité n'a jamais ému la France de Sarkozy. Cela dit, l'heure est à la realpolitic et le mot du président français, ne peut en aucun cas être considéré comme un signe de sympathie pour le pouvoir ivoirien. Malgré les sourires et les franches poignées de main, l'ex-époux de Cécilia n'a voulu qu'on retienne qu'un seul message. Et celui-là, il l'a adressé à l'AFP sans sourire :
"Il faut des élections dans un délai rapide et il faut qu’elles soient transparentes". "Il faut, il faut..." Ca ne vous rappelle pas quelqu'un ? Chirac l'avait déjà dit, non, je crois ?

vendredi 7 décembre 2007

France-Afrique ? .... Europe-Afrique ? Par exemple !

Le président ivoirien Laurent Gbagbo s’envole ce jeudi pour Lisbonne, capitale du Portugal, où il prendra part du 8 au 9 décembre, au deuxième sommet Europe-Afrique. Cette rencontre qui a fait couler beaucoup d’encre et de salive ces derniers temps verra la participation de plusieurs chefs d’Etat et de gouvernement africains dont le président du Zimbabwe, Robert Mugabe que le Premier ministre anglais Gordon Brown ne voulait pas voir à Lisbonne. Le Premier ministre britannique accuse, en effet, le président du Zimbabwe de violer les droits de l’homme dans son pays.


Il a fallu que l’Afrique se montre solidaire du Zimbabwe pour que le Portugal se décide à envoyer à Mugabe une invitation. Finalement, c’est le Premier ministre Gordon Brown qui ne participera pas à ce sommet parce qu’il refuse de s’asseoir à la même table que Mugabe. En tout état de cause, le sommet de Lisbonne aura bel et bien lieu sept ans après le premier qui s’est tenu au Caire, en Egypte.

Le président Gbagbo dont le pays sort progressivement d’une crise armée de cinq ans arrivera à ce sommet auréolé des bons points marqués par son pays sur le chemin de la paix depuis la signature de l’accord politique de Ouagadougou. Aujourd’hui, plus que jamais, les regards sont tournés vers les élections présidentielles qui devraient se tenir au plus tard à la fin du premier semestre 2008 et dont les préparatifs commencent très bientôt.


A tous ceux qui voudront en savoir davantage sur le processus en cours, le président Gbagbo expliquera à coup sûr que malgré les lenteurs constatées, la marche vers la sortie définitive de crise est irréversible.

Augustin Kouyo (Notre-Voie)

vendredi 30 novembre 2007

Accord de Ouagadougou : là où ça fait mal

Juste avant d’entamer leur visite historique dans le nord de la Côte-d’Ivoire, le Président de la République et le premier Ministre se sont rendus à Ouagadougou où ils ont signé le « deuxième accord complémentaire » à l’accord signé en mars 2004.

Les résultats obtenus par cet accord ne se comptent plus : redéploiement de l’administration sur toute l’étendue du territoire ivoirien, décrispation générale des rapports entre les acteurs de la rébellion et le camp présidentiel, normalisation progressive de la vie sociale.

Petite note amère, toutefois, Ouagadougou prévoit l’allocation de 5 ans de salaire aux soldats déserteurs, soit 5 ans de solde équivalant à leurs années de désertion pour fait de rébellion. En clair, les années de désertion pour les soldats en cavale correspondraient à cinq années chômées, payées.

Voici ce que dit l’accord complémentaire de Ouagadougou, en son article 6, : « En application de l’Ordonnance n° 2007-457 du 12 avril 2007 portant loi d’amnistie les deux parties conviennent que le gouvernement rétablira les soldes avec rappel des éléments FAFN ayant appartenu aux Forces armées nationales de Côte-d’Ivoire, à la Gendarmerie et aux corps paramilitaires, pour compter de la date de signature de ladite ordonnance

De quoi faire grincer les dents aux soldats restés loyaux à la République. Etait-ce là aussi la cause du mécontentement de Désiré Tagro, négociteur du camp présidentiel à Ougadougou la semaine dernière ?
Au fond, l'effectif de ces ex-déserteurs « béatifiés » excèderait difficilement 1% du nombre des Forces armées nationales. De fait, l'incidence financière induite par l'article 6 resterait relativement modeste. Toutefois, demeure la question de principe : peut-on réclamer réparation pour désertion ?
La guerre a ses atrocités. La paix aussi. Et cette mesure inique, en apparence, si elle s’appliquait, correspondrait bien aux « atrocités de la paix ».
Mais rien ne valant la paix, les ivoiriens devront surmonter cette autre difficulté pour aller résolument vers la normalisation, pour le plus grand bien des populations largement excédées par la guerre.

lundi 26 novembre 2007

Demain, l'anglais dès le primaire


Dommage collatéral de novembre 2004 ou exigence d’adaptation au nouveau contexte mondial ? Le récent séminaire d'actualisation du programme de gouvernement du FPI a recommandé l’enseignement de l’Anglais dès l’école primaire, selon le Journal Notre-Voie …

Séminaire sur l'actualisation du programme de gouvernement - Le FPI pour l’anglais à l’école primaire

Le séminaire de réactualisation du programme de gouvernement du Front populaire ivoirien (FPI), dans son volet social et culturel s'est achevé hier (mi novembre, NDLR) en début d'après midi à l'académie des sciences et techniques de la mer de Yopougon en présence du président du parti, Pascal Affi N'guessan, qu'entourait pour la circonstance le premier vice-président, Abou Drahamane Sangaré et le secrétaire général, Sylvain Miaka Ouréto.


Dans son discours de clôture, le président du FPI, après avoir félicité le comité scientifique dirigé par le Pr. Dédi Séri et le comité d'organisation pour le travail abattu s'est réjouit de la forte participation des cadres de son parti au processus de formalisation des propositions qui devront être présentées aux ivoiriens pour la convaincre de redonner le pouvoir à son parti à la prochaine élection présidentielle.


En attendant les rapports précis des différentes propositions faites dans les différents ateliers, le patron du FPI s'est félicité de toutes les contributions faites durant le week-end de travail. « Un parti politique se distingue par son projet de société et son programme de gouvernement qui sont sa carte d'identité. Or ces éléments évoluent avec le temps.


Il était donc important qu'ensemble nous revisitions les engagements que nous avons pris devant la nation, que nous décidions des contours de nos futures actions à la tête de l'Etat. Nous devons faire en sorte que le FPI reste égal à lui-même et ne déçoive pas » a-t-il insisté. Comme il l'avait déjà annoncé à l'ouverture des travaux vendredi, le patron du FPI a promis que le fruit des réflexions de l'actuel séminaire seront affiné par le secrétariat général avant d'être soumis à une convention qui en fera la validation définitive.


Mais auparavant, c'est le directeur général du bureau national d'étude technique et de développement (BNETD), Ahoua Don Mello, rapporteur général des travaux a procédé à la lecture du rapport de synthèse.


Au titre des recommandations l'on peut citer pour ce qui concerne le secteur éducation formation, l'introduction de l'anglais au primaire, l'enseignement de l'informatique dès le second cycle, l'adaptation de la formation aux besoins du marché du travail.


Dans le secteur de l'enseignement supérieur, le FP I souhaite la mise en œuvre effective de sa proposition de régionalisation de l'enseignement supérieur à travers la construction d'université dans les grandes régions du pays. Pour booster l'emploi et réduire le chômage, les séminaristes ont recommandé entre autres, la multiplication des grands travaux de l'Etat.


Prochaine étape du processus d'actualisation du programme de gouvernement du FPI, un autre séminaire qui portera cette fois ci sur la refondation économique et institutionnelle.
Guillaume T. Gbato


Notre Voie (Abidjan)
12 Novembre 2007

samedi 24 novembre 2007

Maurice Béjart, Ruth Tondey, l'art en peine ...


Béjart, le cartésien de la danse, disait "Je danse donc je suis".


Ruth Tondey, elle, était une perle de la scène ivoirienne.
Le français a rangé ses pas à 80 ans, cette semaine.


Le même jour, la chanteuse s'éclipsait à un peu plus de 30 ans, à Abidjan...
Saviez-vous que l'espérance de vie est de 42 ans en Côte-d'Ivoire, depuis la partition du pays?
L'art heureusement ne meurt pas. Contrairement aux civilisations, comme le pensait Paul Valéry.

jeudi 22 novembre 2007

Fiction : Bongo, Compaoré et Gbagbo apprennent l'inculpation de Chirac

Bongo Odimba, grand notable de la France-Afrique vient d’apprendre l’inculpation de Chirac. Incrédule, il tourne et retourne le transistor pour voir si la boite à ondes n’a pas perdu un câble. Passé le choc de la première seconde, il en est à poser la question qui n’a cessé de lui bruler la moustache, dès qu’il a appris la terrible nouvelle : « Mais qu’est-ce qu’il a bien pu faire, Jacques, pour qu’on l’inculpe comme un vulgaire contremaitre ? Crime passionnel ? Euthanasie ? Anthropophagie »?


Et le personnel de lui répondre : « Rien de tout ça. On dit que tonton Jacques a donné l’argent a des gens qui ne travaillaient pas. C’est pour ça qu’on veut le mettre en prison ! » Sur ce, le grand notable, complètement assuré de l’innocence de son ami Jacques, lâche un grand rire, ce rire tonitruant que Dadié a si justement diagnostiqué aux nègres. Bongo rigole, mais là franchement, se tient la tête, les côtes, le cou, tapote quelques hanches charnues et se laisse tomber dans un grand Louis XIV sur lequel il ne peut encore s’empêcher de se tortiller de rire.

Reprenant de la voix, il tonne, la pupille dilatée : « Voici ce que je disais, les blancs sont des nègres, des nègres, je vous dis, les blancs sont blancs comme nègres, blancs comme nègres, nègres, oui tous des fils de « Blanche-nègre », dit-il en jetant un regard faquin à un de ces oiseaux rares qui égayent sa cour. La rumeur lui prête, et il le sait, toutes sortes de fantaisies. La vérité est qu’il entretient avec l’essentiel de la faune mirifique de la cour, une relation purement paternelle.


« Blanche-nègre » qu’il appelle aussi « fifille » est l’une de ces icônes dont la rumeur à Libreville aime à se délecter. Mi personnage, mi-mythe, elle est un mélange de Vanessa paradis et de Serena Williams. La voix fluette et éthérée évoque la chanteuse parisienne, tandis que la plastique tonique, un festin visuel – scandale somatique – renvoie à la déesse des courts de tennis.

- Dis, Blanche-nègre tu crois que c’est juste de condamner quelqu’un parce qu’il paye des gens à ne rien faire ?

- C’est pas juste, pas juste, lance la jeune dame au notable françafricain.

- Mais voici que tu es lucide, ma fifille fait l’homme à la jeune féline en se disant« en voilà une qui défend bien sa peau, je la paye à ne rien (lui) faire…

Là-dessus le vieux notable françafricain devient grave. Il abore cette mine hiératique et solennelle qui lui ferme le visage, toutes les fois qu’il rencontre la face de nègre des leaders de l’opposition, ah de vrais nègres, Pierre Mamboundou, Mba Abessole, Pierre-Louis Agondjo, des nègres, fils de nègres…

Il entame une réflexion au carrefour de l’analyse métaphysique et de la pensée éthique. Comment la France peut-elle croire, se dit-il, qu’elle fait honneur à la justice en humiliant publiquement un homme de 74 ans, et pour des prunes ? Ignore-t-on vraiment en France que l’exercice du pouvoir implique des détours couverts par la raison d’Etat ?

La justice française a-t-elle seulement conscience qu’elle déculotte la France en déculottant celui qui l’a incarnée 12 ans durant ? Et que fait-elle des droits de l’homme, cette justice qui livre à la honte un septuagénaire que l’on sait fraichement sorti d’un coma dû à un accident vasculaire cérébral ? Chirac mourrait dans les deux ans qui suivent que ses poursuivants seraient-ils innocents de son sang ?

Jacques Chirac est-il si mauvais pour qu’on lui réserve la vieillesse tourmentée d’un Papon ? N’est-on pas en train de provoquer le réveil de certains extrémismes en piétinant les symboles d’autrui ? Pour le vieux notable, les choses sont claires, on ne doit pas traiter les symboles comme on traite les gens ordinaires…

Il lance un regard rapide à Blanche-nègre qui ne l’avait pas quittée des yeux durant toute sa réflexion et lui fait signe de lui apporter son téléphone. La déesse se déhanche d’un pas de lionne épanouie et lui apporte l'appareil, un joujou de dernière génération.

- Allo Compaoré, tu as appris ce qui est arrivé, ils veulent arrêter Chirac, c’est quoi ça ?

- Je te dis ! Quand même un peu de respect. On ne peut pas traiter un président comme ça. Même s’il n’est plus au pouvoir, il est toujours un grand. Avec des partisans, des inconditionnels. Rien que pour les services rendus à la France, on devrait réfléchir par deux fois avant de le traiter comme un vendeur de cacahuètes.

- C’est ça !

- Et puis je pense que cette façon de traiter les anciens présidents ne peut qu’encourager les présidents en exercice à chercher à demeurer éternellement au pouvoir. Si le pays pour lequel vous avez sacrifié toute votre vie ne peut pas vous protéger aux vieux jours, mieux vaut vous protéger vous-même en restant bien calé dans votre poste toute la vie.

- Wallaï ! Petit ! Mais tu es intelligent dêh ! En tout cas, si l’alternance c’est pour humilier les anciens, faudrait pas qu’on nous parle d’élections transparentes ici ! Bonne soirée, mon petit je vais appeler Laurent, ton nouvel ami, lui doit être content de l’inculpation de Chirac, ils ne sont pas du tout amis…

- Allo, Gbagbo, comment ça va, c’est moi, Bongo, tu dois être content là. Chirac est à deux doigts de la prison, tu es content, n’est-ce pas, avoue…

- Je vais te surprendre, mais ça ne m’amuse pas du tout. Je pense qu’en toutes choses, il faut respecter même les pires adversaires. Chirac ne peut pas être trainé comme un vulgaire brigand et moi en rigoler. Je n’aimais pas ses méthodes, mais je n’ai rien contre l’individu, il est plutôt sympathique comme type. Mauvaise personnalité, à mon avis, mais plutôt bon personnage et peut-être même bonne personne… C’est dommage ce qui lui arrive.

- Mais il a détruit tous tes avions, tué une centaine de tes partisans et toi tu dis quoi ?

- Ah, voilà l’affaire. Mais je pense qu’il faut faire la différence entre le système et l’individu. Que Chirac soit humilié ne rend nullement justice aux familles des victimes ivoiriennes de la politique chiraquienne. Au contraire, cela laisse le sentiment que la France a plus de considération pour quelques billets de francs que pour la vie des ivoiriens. Voici que la justice française poursuit Chirac pour avoir pris de l’argent, mais cette même justice a l’air de se moquer éperdument de la vie des africains, voici le sentiment que ça laisse…

- Mais tu devrais être content qu’on l’arrête, non ?

- Pas du tout, moi qu’est-ce ça peut bien me faire ?

Le vieux notable étonné raccroche après avoir échangé d’autres paroles avec Laurent. Il appelle Blanche-nègre.




La nuit dessine une aquarelle bleutée aux angles des fenêtres du palais. Le vieux prend la jeune fille par la main. « Blanche-nègre », lui dit-il à l’oreille. Elle lui sourit émerveillée. Ensemble, ils marchent le long du jardin bordant la résidence.




Blanche-nègre parle de sa voix fluette, mais il ne l’entend plus. Il sait qu’elle n’est qu’une allégorie. Une image des temps que nous vivons aujourd’hui. Temps de paradoxes et de demi-vérité, d’indignation sélective et de justice en demi-teinte… Une époque où les intouchables ont cessé d'être ceux que l'on croit.
Pour tout oublier, le grand notable plonge dans une somptueuse piscine suivi de Blanche-nègre. Elle est ravissante, ondine des jours interstitiels, dans cette eau aux reflets irisés...

mardi 20 novembre 2007

La France encorne l'orgueil des patriotes africains

L'accord de Ougadougou signé le 4 mars dernier s'oppose, par son parrainage et son contenu, au mode de gestion "classique" des conflits majeurs en Afrique.
Du Rwanda à la Côte-d'Ivoire en passant par le Tchad et le Darfour, la "communauté Internationale", souvent parasitée par d'ex-puissances coloniales, a toujours rêvé d'être au centre de la "résolution " des crises.



La France chiraquienne tentant d'honorer cette tradition en terre ivoirienne a connu un relatif échec, avec les errements de l'accord de Marcoussis. La Côte-d'Ivoire s'est donc vu en droit d'expérimenter la donne endogène. C'est ainsi qu'est né l'accord de Ouagadougou, marqué par des négociations directes entre bélligérants internes et l'arbitrage d'un concilateur de la sous-région.

Cette option révolutionnaire - en bousculant les dogmes et autres axiomes rouillés de la vieille mécanique françafricaine - a eu pour conséquence (eh oui !) d'assécher bien de vannes.

Aujourd'hui, des trésors d'énergie sont mobilisés pour la normalisation de la vie en Côte-d'Ivoire et dans toute la sous-région ouest africaine, mais l'appui de la "communauté international" demeure des plus discutables.

Illustration : André Janier, ambassadeur de la France en Côte-d'Ivoire répondant à la demande d'appui des acteurs ivoirien à la sortie de crise, par une formule pour le moins étudiée : "Aide toi et le ciel t'aidera !"

Frapper les esprits rétifs à la bonne cathéchèse de la génuflexion, cravacher l'orgueil des "révolutionnaires" sur le ton du sarcasme revanchard : tout un art de la corruption idéelle...

La phrase est petite - dans la forme comme dans le fond - mais elle révèle le champ conceptuel et tout l'arrière-plan topique de la France dans ses rapports avec des Etats dont elle a du mal à réaliser l'indépendance.
Cela dit, les acteurs ivoiriens en tendant la main, prêtent le flanc à ce type de réactions toutes prévisibles.

"Le ciel ", dit Janier parlant de la France. Que faisons-nous, patriotes africains ou ivoiriens, pour libérer l'imaginaire de bien d'occidentaux de ce daltonisme ?

http://news.abidjan.net/h/272054.html

mardi 6 novembre 2007

6, 7, 8, 9, novembre 2004, nuits de cristal à Abidjan




Armés de chansons, ces civils ivoiriens ne se doutaient pas du tout de ce qui se tramait dans l'esprit des deux messieurs juste derrière la haie .
Faut-il, pourtant, aujourd'hui en concevoir de la haine ?
Tous les français sont-ils comptables de ce qui s'est déroulé en Côte-d'Ivoire ?
En ont-ils même vraiment été informés ?
Ont peut en douter !
L'article* que nous retranscrivons plus bas, est l'un de ces chefs-d'oeuvre d'intoxication par lesquels l'on a abruti l'opinion occidentale, pour lui cacher la face réelle des événements. Souvenons-nous des nôtres. Sans haine, ni rancoeur.

6, 7, 8, 9, novembre 2004, les 4 "nuits de cristal" de l’armée française en Côte-d’Ivoire

Le mois de novembre 2004 restera gravé dans la mémoire des patriotes ivoiriens. Près de 70 civils ivoiriens fusillés, ces jours là, par l’armée française conduite, en Côte-d’Ivoire, par les généraux Poncet et Destremau.
* Le chef d'oeuvre d'intox est disponible sur le lien :
http://www.racismeantiblanc.bizland.com/silenceselectif/bid57.htm


"Aéroport International d'Abidjan - Après 3 jours de chasses aux Blancs à travers le pays, des milliers de Blancs de toutes nationalités s'apprêtent à fuir la Côte d'Ivoire.( source BBC News )"
(Chef-d'oeuvre d'intox,ndlr)*

Samedi 06 Novembre 2004, Laurent Gbagbo, le président de la Côte d'Ivoire, décidait de lancer une attaque surprise sur la ville de Bouaké contre les troupes françaises mandatées par l'ONU dans le cadre de l'Opération Licorne visant à prevenir une guerre civile.
En début d'après midi, deux chasseurs Sukhoï de l'armée ivoirienne lançaient sur le camp des militaires français des bombes de 250 Kilos, tuant un missionnaire américain, 9 soldats et en blessant 22 autres. Cette attaque surprise était la plus meutrière subie par les troupes françaises depuis la guerre du Liban, en 1983.
Dans les minutes qui suivirent, Jacques Chirac ordonnait la destruction de la quasi totalité des moyens aériens de l'armée ivoirienne ; Deux Sukhoï 25 et cinq hélicoptères d'attaque au sol MI25 étaient mis hord d'état de nuir. L'incident allait marquer le début de trois jours d'émeutes anti-françaises et de chasses aux Blancs dans les rues d'Abidjan et de Yamoussoukro.

A peine la destruction de l'armement ivoirien était-elle connue que les jeunes patriotes, des milices informelles au service de Gbagbo, allaient provoquer des émeutes à travers le pays.

A Man, dans l'ouest de la Côte d'Ivoire, des manifestant pro-Gbagbo assiégaient un cantonnement de gendarmes français et l'attaquaient à coups de Cocktails molotov tandis que les soldats français tiraient des grenades lacrymogènes pour disperser les émeutiers. La ville de San Pedro, toujours dans l'Ouest du pays, était le théatre de plusieurs scènes de violence.

A Abidjan, des combats éclataient autour de l'aéroport internationale lorsque l'armée ivoirienne, l'ayant fait fermer, tentait d'en prendre le contrôle, ce qui aurait pu lui permettre de bloquer l'arrivée de renforts français. Tandis que l'armée française tâchait de sécuriser le lieux, une quinzaine de civils français, menacés par une foule de plus en plus hostile appelait à l'aide les forces de l'opération Licorne, qui devait parvenir à les secourir une heure plus tard.

La situation, dès lors, ne devait plus cesser de se dégrader car si, à l'aéroport d'Abidjan, militaires français et ivoiriens parvenaient à un cessez le feu, la stratégie de Laurent Gbagbo consistait essentiellement à prendre en hôtages les ressortissants occidentaux, utilisant pour ce faire les Jeunes Patriotes controlés par Charles Blé Goudé.
Ceux ci commençaient à attaquer à tout les symboles de la présence française en ville. Tandis que la résidence des gendarmes français était mise à sac, Les écoles françaises étaient incendiées. La directrice du lycée Jean Mermoz, assiégée par une bande de deux cents personnes venus pour la lyncher, n'allait avoir la vie sauve que grâce à l'intervention in extremis de l'armée française, qui allait lui faire quitter les lieux par hélicoptère.

Après ces symboles,ce sont les résidences des français, et de façon générale des Blancs, qui allaient être la cible de la haine raciste des partisans de Laurent Gbagbo. Dans le quartier de Bietry, des Français étaient contraint de se réfugier sur le toît de leur immeuble tandis qu'on pillait et incendiait leur appartement. Là encore, c'est par hélicoptère qu'ils allaient être évacués. Lorsque le soir arrivait, on comptait une quarantaine de pillages à travers la ville.

Soumis aux pressions des autorités française, Laurent Gbagbo et son entourage allaient avoir recours à la méthode déjà utilisée en 2000 au Zimbabwe par Robert Mugabe au début du nettoyage ethnique mené contre la population blanche par le ZANU-PF.
Le président du Zimbabwe, tout en pronant une légalité de façade, s'était appuyé sur les vétérans de guerres, sur lequels il prétendait n'avoir aucun contrôle, pour semer la terreur dans les campagnes. Reprenant cette stratégie du double jeu, d'un côté Laurent Gbagbo et les représentants de son gouvernement appelaient au calme. De l'autre, l'entourage de Gbagbo ne cessait de pousser la population aux violences anti-française et anti-blanche.

Désiré Tagro, le porte-parole de la présidence ivoirienne apparaissait à la télévision appelant à ce que "chaque ivoirien, chaque ivoirienne, bien qu'en colère au vu de se qui s'est passé, garde son calme et que personne ne s'attaque aux biens des étrangers, aux sociétés étrangères et en particuliers aux biens français et aux sociétés françaises."

Toutefois parallèlement, les meneurs d'organisations proches du pouvoir ivoirien, passant eux aussi à la télévision, tenant une réthorique enflammée tandis que les médias attisaient systématiquement la haine des Ivoiriens envers les Français.

Charles Blé Goudé, le leader des Jeunes Patriotes, à la télévision, appelait à descendre dans la rue. " Une question se pose à nous maintenant" déclarait-il "mourir dans la honte ou mourir dans la dignité."

Pascal Affi N'Guessan, le président du FPI, le parti de Gbagbo, demandait "aux patriotes dès cet instant de descendre massivement et d'occuper la, rue à Abidjan et toutes les villes du pays et d'empêcher par tous moyens la libre circulation de toutes forces étrangères jusqu'à la victoire finale, c'est à dire la réunification de notre pays."

Mamadou Coulibali, le président de l'assemblée nationale ivoirienne, menaçait de façon à peine voilée les ressortissants français, mettant en garde contre la possibilité d' "actes hyper-barbares" et promettant que la côte d'ivoire serait pour la France "pire que le Viet-Nam"

Dés cet instant des dizaines de milliers de manifestants surexcités allaient se rassembler dans les rues tandis que la population blanche de Côte d'Ivoire vivait sa première nuit de terreur. Ici et là, les français aller se regrouper et s'armer pour se protéger pendant que toute la nuit, les casseurs ivoiriens pillaient les maisons des mebres de la communauté française.

"C'est une foule trés hostile, ils chantent des slogans, des insultes, des choses comme "Tous les Blancs dehors", "A chacun son Blanc"Philippe Moreux, porte parole des Nations Unis (Source: Fox News)

Le Dimanche 07 Novembre 2004 au Matin, l'évacuation et des mesures de protection des ressortissants occidentaux étaient mises en place par l'armée française. En début de matinée, le colonel Henri Aussavy, porte parole de l'opération Licorne, signalait que l'armée avait déjà récupéré 80 personnes pour les mettre à l'abri dans les cantonnements du 43ème Bima. A midi ce chiffre était passé à 150. En fin de journée ce sont plus de 1200 personnes de toutes nationalités occidentales qui venaient se mettre à l'abri de la haine raciale des émeutiers pro-Gbagbo tandis que l'ONU ouvrait également des lieux d'accueil, notamment à l'hotel Ivoire, d'où une douzaine de personnes allaient être évacuées par hélicoptère.

Plusieurs ambassades de pays occidentaux diffusaient des mises en garde en direction de leur ressortissants, les invitant à rester chez eux ou à éviter de se rendre en Côte d'Ivoire.
Tandis que 400 militaires français arrivaient en renfort à l'aéroport international d'Abidjan, et que l'armée française commençait à reprendre le contrôle de la ville et de ses points stratégiques, des dizaines de milliers de manifestants convergeaient de toutes parts.
Armés de barre de fers, de gourdins, de hâches et de machetes, ils érigeaient ici et là des barricades de pneux enflammés et s'avançaient de façon menaçante en direction de l'Aéroport international d'Abidjan, contraignant l'armée française à utiliser un hélicoptère de combat pour faire des tirs de sommation dans leur direction.

"Le gouvernement pousse à tuer les Blancs. - pas juste les Français, tous les Blancs"Marie Noël Mion, une rescapée des chasses aux Blancs (Source: FoxNews)

Ne pouvant aller plus loin, les émeutiers allaient rebrousser chemin pour se diriger vers les quartiers résidentiels de Bietry et de Cocody aux cris de "à chacun son blanc", "il vaut mieux tuer un blanc que le voler".

Dès lors, c'est un scénario sordide qui se reproduisait à plusieurs reprises. Les Emeutiers, tels des colporteurs de haine, faisaient du porte à porte, exigeant de savoir si chaque résidence étaient habitée par des Blancs.
Lorsque cela s'avèrait être le cas, l'habitation était saccagée et pillée tandis que ses habitants, s'ils avaient le malheur de se trouver là, étaient pris à partis. Les Blancs sur lesquels les racistes ivoiriens mettaient la main étaient frappés, battus et brutalisées; plusieurs dizaines de femmes blanches impitoyablement violées par les jeunes patriotes.
De nombreuses agressions seront d'ailleurs confirmées par la suite par Catherine Rechennmann, la présidente de l'Union des Français de l'étranger en Côte d'Ivoire et par Hervé Ladsous, le porte parole du ministère des affaires étrangères.

Pour la seconde nuit consécutive, des milliers de Blancs allaient vivre une nuit de terreur et d'angoisse tandis que les rues de la capitale ivoirienne résonnaient d'appels à tuer des Blancs, de détonations et du vrombissement affairé d'hélicoptères militaires (!?ndlr). Entreprises, magasins, écoles, logements allaient être à nouveau brûlés et saccagés.

Hors d'Abidjan, la situation était également trés tendue.
A San Pedro, des foules de Noirs mettaient à sac les magasins et les entrepôts français. Certains Blancs étaient contraints de se réfugier dans le bush, aux abords de la ville, pour échapper au déchainement de violences albophobes.

A Daloa, l'école française était incendiée et la ville était le théatre de pillages et de manifestations.

On signalait aussi des violences à Yamoussoucro ainsi que dans les stations balnéaires d'Assynie et de Bassam.

"la première responsabilité du président de Côte d'Ivoire doit être de rétablir le calme, de faire cesser ces déclarations racistes et xénophobes d'un certain nombre de personnes qui sont autour de lui, de faire cesser les manipulations et les appels à la chasse anti-Blancs"Michèle Alliot Marie, Ministre de la défense (source: Nouvel Obs)

Le Lundi 8 Novembre 2004 au matin, un calme relatif était revenu sur la capitale de la Côte d'ivoire grâce à la présence massive de l'armée française.

Dans le quartier de Cocody, une cinquantaine de blindés étaient déployés autour de l'Hôtel Ivoire afin d'en faire un centre de regroupement pour les français dont un grand nombre s'était déjà réfugié là.
Poursuivant sa politique de prise en otage des populations blanches, Le pouvoir ivoirien cherchait à nouveau à exacerber les tensions dans la capitale.

Vers midi, un porte parole présidentiel se mit à faire courir à la radio le bruit que l'armée française avait convergé vers la résidence du président Gbagbo où elle s'apprétait à le renverser.
La radio appelait donc les "patriotes" à converger vers l'hôtel ivoire pour y livrer la "bataille finale" et y former un bouclier humain pour la protection de Gbagbo. Il s'agissait en fait d'une habile manipulation car le mouvement des troupes françaises dans le quartier du président Gbagbo avait en effet pour but de protéger l'ambassadeur de France, dont la résidence avait un mur mitoyen avec celle du président de la Côte d'Ivoire. Ces résidences étaient, en fait, distantes d'un kilomêtre de l'hôtel Ivoire.

Cette annonce eu un effet immédiat et bientôt, les forces française étaient confrontées à une foule d'une centaine de milliers de personnes hurlantes et vociférantes. Les soldats français étaient alors contraints de procéder à des tirs de sommation, puis à balles réelles, pour obliger une foule de plus en plus agressive à reculer. A la mi-journée, les abords de l'hôtel ivoire étaient à nouveau calmes.

Si, le 06 Novembre, Catherine Alliot-Marie, la ministre de la défense française avait déclaré que la France n'envisageait pas de rapatrier ses ressortissants, les violences racistes allaient amener la France à infléchir sa position, de nombreux expatrié ayant décidé, en dépit d'appel à rester du président Gbagbo, de quitter définitivement le pays, ou du moins à rapatrier leurs femmes et leurs enfants pour les mettre à l'abri.

3 avions de 250 places chacuns étaient affectés à l'évacuation des français tandis que d'autres pays mettaient eux aussi en place des mesures d'évacuations de leurs ressortissants. Entre le 10 et le 17 Novembre, le Ministère des affaires étrangères allait organiser 14 vols pour évacuer ceux qui le souhaitaient.

"Au total" signalait le ministère dans un communiqué de presse du 19 septembre 2004, "ce sont donc 5434 Français, dont 1560 enfants qui ont été rapatriés par les 14 vols qu'avait affrétés le ministère des Affaires étrangères. Il y a eu, également, 2 898 Français qui ont été rapatriés par d'autres moyens aériens, soit des vols privés affrétés notamment par des entreprises dont ils étaient les employés, soit des vols militaires organisés par nos partenaires européens. Donc, si on totalise, le nombre total de Français qui ont quitté la Côte d'Ivoire entre le 10 et le 18 novembre s'établit à 8 332."

"Cette nuit, j'ai rêvé. Abidjan en état de siège. Les camions militaires, les coups de feu, la peur.... Nos dernières heures en côte d'Ivoire ont été terribles. Nous avons passé la nuit avec les voisins, qui étaient venus se réfugier chez nous parce que leur maison était en train de se faire piller. Les femmes et les enfants étaient en haut, et les papas en bas, montant la garde. Dehors, les "patriotes" criaient: "Où sont les Blancs? Où sont les Blancs?"Denis, un rapatrié de Côte d'Ivoire (Source: la croix )
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Par souci d'hygiène ou pourrait plutôt lire cet autre regard...
Porté par deux journalistes de Canal + Horizon, Paul Moreira et Stéphane Haumant...
sur le même événement :
"On a étouffé un massacre. Et quand je dis “on”, je veux parler des journaux de gauche, comme Libération, qui a repris la version officielle de l’armée française. Le Monde aussi."

Le 4 Novembre 2004, sur ordre du président Laurent Gbagbo, l’armée ivoirienne entame l’opération César - qui sera connue par la suite sous le nom d’opération Dignité. L’objectif est, sinon la reprise totale de la zone nord, du moins une mise sous pression militaire pour ramener les rebelles à la table des négociations.

Dès que Stéphane Haumant apprend que les attaques ont commencé, il décide de repartir à Abidjan. Mais cette fois-ci, il ne s’agira plus d’un repérage: il part avec toute son équipe (composée de trois personnes: lui-même, Jérôme Pin et Laurent Cassoulet) pour tourner son sujet sur les conditions de vie des Français de Côte d’Ivoire. Du moins le croit-il.
Dès le 5 novembre, leur avion attérit à l’aéroport d’Abidjan - qui n’est pas encore fermé ce jour-là. Le 6, c’est le fameux bombardement du camp militaire français de Bouaké dans des conditions encore mystérieuses aujourd’hui.
La réponse du pouvoir politique français sera déterminante: sur ordre de Jacques Chirac, l’aviation ivoirienne est détruite par les forces françaises. Quelques heures plus tard, lorsque Charles Blé Goudé va à la RTI pour appeler les Ivoiriens à descendre sur le BIMA pour protester, Stéphane et son équipe sont à l’hotel. Ils n’en sortiront plus ce soir-là: ils sont au coeur du scoop.

STEPHANE HAUMANT (CANAL +) PARLE:
Le 6, en milieu de journée, l’aéroport est fermé et on se retrouve un peu par hasard à notre hotel, le Novotel du Plateau. Et on commence à tourner notre film avec les premières informations: Blé Goudé qui appelle les Patriotes à descendre dans la rue, et puis l’enchainement…
On filmait les Jeunes Patriotes qui affluaient vers les ponts de notre chambre d’hotel. On avait choisi le Novotel parce que je savais que c’était un bon point d’observation puisque j’étais là cinq ans auparavant et qu’il s’était passé exactement la même chose (en octobre 2000).
Sauf que cette fois, Blé Goudé a appelé les Patriotes à marcher sur le BIMA. Ils affluent donc en début de soirée sur les ponts pour atteindre le BIMA. Et puis vers 22h, ça commence à exploser dans le ciel, donc on ne comprend pas du tout ce qui se passe.
On file sur le toit de l’hotel et peu à peu, on comprend qu’il y a des rotations d’hélicoptères qu’on dévine français qui tirent sur les ponts pour empêcher les manifestants de passer. Puisque c’est un flot de quelques dizaines de milliers de personnes au moins, si ce n’est peut-être de centaines de milliers; c’est difficile à évaluer, mais c’est beaucoup beaucoup de monde.”

Message de Blé Goudé à la télévision

“Evidemment, quand Blé Goudé passe à la télévision, il ne dit pas: “nous avons bombardé Bouaké, nous avons tué neuf Français”. Il dit simplement à peu près ceci: “L’armée ivoirienne vient d’être rasée par l’armée française: ça suffit, il est temps de mettre dehors cette armée d’occupation; je vous demande d’aller déloger les militaires du 43ème BIMA.”
Les Jeunes Patriotes sont les premiers dans la rue, mais il y a des dizaines de milliers d’Ivoiriens qui ne sont pas Jeunes Patriotes, mais qui sont juste hallucinés d’apprendre qu’en quelques minutes leur aviation a été rasée par la France. Ils ne comprennent pas du tout pourquoi.
Donc par colère, par nationalisme, ou par patriotisme - je ne sais pas - ils descendent dans la rue et du coup ça fait une énorme masse, bien plus nombreuse sans doute que les quelques milliers de militants encartés comme Jeunes Patriotes.”

Moment médiatique, moment historique

“Je crois savoir qu’on est les seuls sur place. Donc ça, professionnellement, c’est intéressant. Je sais que tous les aéroports sont fermés, mais je ne sais pas s’il n’y a pas quelques journalistes déjà sur place comme nous, ou d’autres qui ont pu prendre les derniers vols ou qui sont arrivés par la route. Donc je me dis qu’on doit être à peu près les seuls, qu’en tout cas il ne doit pas y avoir beaucoup d’équipes.
Je ne sais pas si ce sera un scoop parce que je ne pense pas que les Français soient spécialement intéressés par ce qui se passe en Côte d’Ivoire, mais professionellement c’est intéressant, surtout si on est les seuls. Et par rapport à l’histoire de la Côte d’Ivoire, je me doute bien qu’on est en train de vivre quelque chose de très important, même si je ne sais pas comment ça va tourner parce qu’il y a neuf morts français et que je sais bien qu’il y a très longtemps que ce n’est pas arrivé et que c’est forcément très grave.
La France ne va pas laisser passer ça, d’autant qu’elle en veut beaucoup à Gbagbo, et donc je me demande si on ne va pas vers un coup d’Etat. Mais si coup d’Etat il y a, peut-être que le Nord va en profiter pour marcher sur le Sud, ce qui peut entraîner une guerre civile. Le contexte fait qu’il peut se passer beaucoup de choses qui peuvent être decisives pour la Côte d’Ivoire.
En tous cas, même si ça ne va pas aussi loin, voir une foule nombreuse marcher sur une armée, même bien équipée, c’est impressionnant. Et c’est compliqué de contrôler des centaines de milliers de gens. Au moins, nous sommes bien placés pour filmer des choses passionnantes.”

La tension monte

“Dès le 6 dans l’après-midi, dès que j’apprends ce qui s’est passé à Bouaké, j’appelle mon contact français avec qui je dois tourner. Il est dans sa voiture. Il doit être 15 ou 16h. Il me dit au téléphone: “Ecoute, on oublie le tournage. Je ne peux pas venir te voir. Ce qui se passe est très grave. Je rentre tout de suite chez moi. Et puis là, je vois un attroupement en face de moi. Je te laisse.” Et il coupe. Bon, je le connais. C’est un mec plein de sang froid. Je sens à son ton paniqué que ce qui se passe est grave, parce qu’il est plus sensible que moi à ce qui est en train de se passer.
Je le rappelle le soir même. Il est à son domicile. Il me parle assez brièvement. Ils ont tout éteint. Il me dit: “C’est chaud; je ne sais pas ce qui va se passer.” Et pendant qu’il me parle, j’entends des rafales de Kalashnikov en fond. Bon, on ne leur tire pas dessus, mais je sens bien que ça chauffe dans la ville.
Ensuite, quand je vois ces centaines de milliers de gens qui deferlent sur les ponts - même si Blé Goudé a dit: “On met l’armée française dehors” - je comprends tout de suite que ça va chauffer pour les Français. Parce qu’un Blanc, militaire ou non, reste un Blanc. Et la colère, et l’alcool, et la nuit, et la fatigue aidant, ça va forcément dégénérer.
Donc, dès le début, nous savons que ça va être chaud pour les Blancs. Moi, à la seconde où on m’a dit que l’armée française a rasé l’aviation ivoirienne, à cette seconde-là, j’ai compris avec toute mon équipe que c’était parti. Donc on a mis quelques affaires dans un sac, on a sorti les caméras, mis tout dans le coffre, et on s’est dit “Maintentant, on va voir ce qui se passe, on tourne”. Mais on savait que c’était parti pour une escalade inévitable.”

Tournage à haut risque

“Toute la nuit du 6 ça bombarde. Le 7 au matin, j’appelle les Jeunes Patriotes en leur disant: “Je vais voir ce qui se passe en ville”. Ils me disent: “Pas question, tu bouges pas; c’est trop dangereux.” J’appelle mon contact français qui me dit: “J’ai le numéro d’un commissaire de police. Il va venir vous chercher avec des hommes. Mais tout ce qu’ils peuvent faire, c’est t’amener aux militaires français les plus proches parce qu’on ne peut pas circuler.”
Donc, le 7 au matin, un flic ivoirien vient me prendre en voiture. On traverse les rues vides en prenant tous les sens interdits et il nous amène à peu près un kilomètre de là, au pied du pont. Là, on se retrouve avec les militaires français, donc en totale sécurité.
On filme la journée des militaires français, des contrôles de passeport sur les ponts, quelques exflitrations, etc. On passe donc plus ou moins la journée avec les militaires. Le 8 au soir, on va au BIMA, on filme les refugiés français qui arrivent au camp.
Dans la nuit, on passe la nuit chez notre contact français. Et le 9 au matin, il nous dit: “Bon, je pense que ca s’est calmé, on peut sortir.” On prend donc son 4X4, sans aucune arme ni escorte. Et je savais que ça chauffait un peu côté Hotel Ivoire, donc on part vers l’Hotel Ivoire. Donc, c’est seulement le 9 au matin qu’on a pu sortir sans protection armée.”

La partialité des médias nationaux

“On a deux sources principales d’information officielle. Du côté de la télévision française (i-Télé et LCI), ce qu’on entend, c’est: “Déchainement de violence contre les Français. Les Ivoiriens ont tué neuf soldats, et maintenant ils s’attaquent à nos Français.” C’est tout. Côté ivoirien (la RTI), c’est: “La France nous attaque. Elle a rasé notre aviation. L’armée française est dans la ville. Ils veulent la fin de Laurent Gbagbo.” Voilà. Il y a donc deux versions totalement différentes.
Moi j’ai les deux versions, ce qui me permet de reconstituer la réalité. Par ailleurs, je suis en contact permanent, à peu près dix fois par jour, et avec l’armée française (qui me donnent certaines informations), et avec les proches de Blé Goudé (qui m’en donnent d’autres), et avec plusieurs entrepreneurs français sur place (qui m’en donnent encore d’autres). Donc avec tout ça, à chaque moment, je sais à peu près qui a peur, qui attaque, qui se défend, ce qui est vrai, ce qui ressemble un peu à de l’intox ou ce qui est parcellaire. Et en gros, chacun a une petite part de vérité; et il y a énormément de rumeurs qui circulent.”

Rumeurs invérifiées et légendes urbaines

“Par exemple, un Français m’appelle à un moment et me dit qu’il y a dix cadavres de Français sans tête qui ont été retrouvés dans la lagune. Donc je commence par passer des coups de fil peu partout pendant quarante-huit heures. A Licorne, on me dit: “Non, ce n’est pas vrai.” Je me dit: “Ils me mentent. Ils savent des choses.” Je vais sur place. Je trouve un entrepreneur français de pompes funèbres, qui me dit face à la caméra, les yeux dans les yeux: “J’ai vu les dix cadavres; il y a dix cadavres de Blancs sans tête.”
Là je me dit “waow”. Comme je fais des petites interventions sur RMC Info et sur i-Télé, je suis à deux doigts d’annonçer l’info. Mais je me dit que je n’ai pas vu les cadavres, donc je ne dis rien. Je continue de vérifier l’info. Je vais au BIMA. J’exige des explications. Je dis au porte-parole: “Vous n’avez pas le droit de nous cacher ça. Dix Blancs décapités, vous ne vous rendez pas compte, etc.”
Ils me donnent leur parole d’officiers que ce n’est pas vrai. Pourtant j’ai enregistré le mec qui me l’a dit face caméra. Au final, pour ce que j’en sais, ce n’est qu’une rumeur. Mais il y a encore aujourd’hui des Blancs qui me demandent: “Pourquoi vous n’avez jamais parlé des dix corps de Français décapités?”
Après les évènements, j’ai cherché à savoir. Je leur ai dit de me donner les noms de famille. Ce n’est quand même pas si compliqué. Je n’ai jamais eu les noms. Mais sur le moment, dans l’ébullition, j’étais près à le croire.”

PAUL MOREIRA (CANAL +) ACCUSE
Crimes de guerres

“L’armée française a commis en Côte d’Ivoire ce que la Convention de Genève appelle un crime de guerre. C’est-à-dire qu’elle a tiré sur des manifestations de civils désarmés avec des armes léthales.
Il y a eu un déséquilibre monstrueux dans le rapport entre le niveau de danger auquel était soumis les militaires et les moyens employés. Et nous l’avons prouvé par l’image. On a pu filmer les incidents sur les ponts, quand on voit clairement des manifestations de civils qui sont prises pour cibles par des hélicoptères de combat. Puis on a mis en lumière qu’une manifestation quelques jours plus tard devant l’Hotel Ivoire a été dispersée à l’arme de guerre.”

Mensonge d’Etat

“C’est un mensonge d’Etat parce que dans un premier temps, ce qui est dit dès le lendemain, c’est que jamais l’armée française n’a tiré dans la foule. Les seuls tirs reconnus sont des tirs de sommation.
Cela prendra en gros vingt jours pour que cette version évolue, lentement, par à-coups, jusqu’à ce que la ministre Michelle Alliot-Marie reconnaisse la veille ou l’avant-veille de la diffusion de notre enquête qu’il peut arriver que dans des situations de légitime défense ”élargie” - c’est un concept qu’on a forgé pour l’occasion - l’armée française fasse un usage total de ses armes;
notamment sur les ponts et à l’Hotel Ivoire. Or entre ces deux déclarations, c’est la nuit et le jour, puisque dans un cas on vous dit: “Non, on n’a jamais fait usage de nos armes - juste des tirs de sommation.” Et dans l’autre, on vous dit: “Oui, dans certains cas, nous avons été obligés de faire usage de nos armes.”
Entre temps, il a été dit qu’il s’agissait d’échanges de feu entre des manifestants armés et des gendarmes ivoiriens venus s’interposer entre les manifestants et l’armée française. Puis, on a dit que c’était l’armée française qui a été obligée de tirer pour sauver la vie de gendarmes ivoiriens.
Puis que c’était les gendarmes ivoiriens qui s’étaient retournés contre l’armée française. Enfin, on a dit que c’était des types qui étaient montés sur des chars détenus par des troupes d’élite et qui avaient armé une mitrailleuse française. J’oubliais aussi la version disant que c’étaient des snipers israéliens travaillant pour le pouvoir ivoirien qui avaient tiré dans la foule pour tuer quelques personnes et surexciter les manifestants.”

Comment “on” étouffe un massacre

“Moi, je rapproche cette histoire de ce qui s’est passé le 17 octobre 1961 à Paris, pendant la guerre d’Algérie. Ce jour-là, le prefet de police Maurice Papon avait donné l’ordre à la police française d’être d’une extrême fermeté avec des manifestations d’algériens, des civils désarmés.
Et il y avait eu au moins une centaine de morts, d’algériens tués, certains jetés à la Seine en plein Paris, parfois tués quasiment dans les halls des grands journaux parisiens. Et personne n’en a parlé. Il a fallu attendre en gros trente ans pour que la vérité soit faite.
Je me suis toujours intéressé aux questions d’immigration et aux aspects violents de l’après-colonialisme français; et je me suis toujours dit qu’on avait étouffé un massacre, mais que c’était une époque particulière: 1961, pas de caméras, pas d’images, la presse était beaucoup plus tenue, etc. Et là où cette histoire ivoirienne m’a surpris, c’est qu’elle a lieu en plein époque de l’image, que les images circulaient, qu’elles étaient criantes d’évidence, et que malgré tout, on a étouffé ce qui s’est passé à Abidjan en novembre 2004.”

Les médias complices d’un crime de guerre

“On a étouffé un massacre. Et quand je dis “on”, je veux parler des journaux de gauche, comme Libération, qui a repris la version officielle de l’armée française. Le Monde aussi. Seuls le Canard Enchaîné, i-Télévision et Canal+, et peut-être Marianne, sont allés au-delà de ce que l’armée française a fourni en termes de communication.
C’est un énorme embarras pour je pense l’ensemble de notre profession, et c’est pour ça que mon livre est un petit peu boycotté par un certain nombre de grands médias, notamment ceux que je viens de vous citer. Parce qu’au fond, en tant que journalistes, on s’est rendu complices d’un crime de guerre. Alors que personne ne nie ce que nous avons montré. Même la ministre, assez honnêtement d’ailleurs, a reconnu finalement les faits.
Malgré cela, pas de réaction: on peut tuer autant de personnes. Imaginez ça boulevard de la Madeleine, sur des viticulteurs. On en parlerait encore. Ce serait un scandale. J’en ai discuté plus tard avec des militaires que je connais, parce qu’il y a des gens formidables dans l’armée française - je tiens à dire -, et qui m’ont dit: “Je ne sais pas comment les tireurs d’élite se sont regardés dans la glace le lendemain, parce qu’ils n’étaient pas obligés de tirer. Parce qu’on ne tire pas sur les manifestants.”
En France, on a eu Mai 68 qui étaient des émeutes d’une violence extraordinaire, c’est pas le dizième de ce qui est arrivé devant l’Hotel Ivoire.”

Une nouvelle forme de censure

“C’est le deni qui est extraordinaire. Il y avait une cellule au ministère de la defense, que j’appelle une “cellule d’infirmation”, parce qu’ils infirmaient tout ce que nous affirmions. J’ai eu affaire à eux. Tous les arguments étaient bons. Il ne s’agissait pas de nous censurer, évidemment, puisqu’aujourd’hui la censure n’est plus opérante. Il faut convaincre, séduire, détordre. Mais enfin dans ce cas précis, c’est quand même hallucinant, parce que les images existaient. On n’est pas sur quelque chose de tengeant. Et donc, ils disaient aux journalistes: “Non, mais, on ne les voit pas, mais il y a des types armés [parmi les manifestants].”“

lundi 29 octobre 2007

Gbagbo met fin à la carte Ouattara

La carte de Séjour sera bientôt supprimée en Côte-d’Ivoire, telle est l’annonce que le président ivoirien Laurent Gbagbo a faite le dimanche 28 octobre 2007, à la communauté burkinabé résidant en terre ivoirienne.

Cette information qui a suscité un réel soulagement au sein de la communauté étrangère vivant sur le sol ivoirien prend à contre-pied toute l’orthodoxie professée par les théoriciens d’une Côte-d’Ivoire xénophobe.

Une telle annonce reste aussi un camouflet à celui qui en 1991, en tant que Premier ministre d’Houphouët-Boigny, avait institué, pour la première fois, la carte de séjour : Alassane Ouattara.

L’Administration Bédié qui prendra le témoin maintiendra, de toute évidence, « la carte Ouattara », puisque seul le socialiste Laurent Gbagbo, alors Secrétaire Général du FPI l’avait dénoncée au moment de son instauration en 1991.

La relation de Ouattara à la carte de séjour repose sur une énigme, voire un paradoxe : une posture d’extrême droite pour une personnalité considérée par l'opinion publique comme ayant des origines étrangères (son père, chef traditionnel au Burkina Faso y a vraissemblablement été inhumé).

Le caractère paradoxal d’un tel choix se dissipe dès que l'on sait qu’il est fondé sur l’opportunisme, matière première de la carrière de bon nombre d'hommes politiques.

Plus libéral par formation que par conviction, Ouattara est tout aussi peu sensible aux considérations humanistes si chères aux paroisses de gauche. A défaut de substrat idéologique clair, l'homme vogue à vue, depuis ce jour où fasciné par les lambris des salons Houphouétiens, il s’est mis en tête d'échanger son costume de technocrate contre le boubou de la contestation politique à relents régionalistes.

Les vents qui le jettent au large des côtes ivoiriennes, par un soir des années 90, sont ceux de la contestation du régime autocratique d’Houphouët et la radicalisation de la crise économique qui sévit depuis le début des années 80.

Appelé à la rescousse par un PDCI aux abois, Ouattara préférera très vite le jeu politique à la tâche technique qui lui avait valu d’être le premier (et d’ailleurs le seul) premier Ministre d’Houphouët.

C'est dans le jeu de séduction d'un PDCI profondémént "droitiste", qu' il instaurera, au mépris de la spécificité sociologique de la Côte-d’Ivoire, la carte de séjour, seul acte administratif de l'affirmation identitaire rampante.
Endossant, et radicalisant ainsi les présupposés de ce qui deviendrait l’ivoirité, Ouattara mettra une sorte de ligne de démarcation poppérienne entre ivoirien de souche et ivoiriens d'adoption, nationaux et non-nationaux, ligne virtuelle dont l' activation prend une certain fait dans les événements de septembre 2002.

L’histoire de la "Carte Ouattara" est celle de la plus grande imposture qu’ait jamais donné à voir une organisatiuon politique de la sous-région ouest-africaine. Instaurer des conditions d’austérité sans limite pour les étrangers et - une fois le pouvoir perdu - crier au loup en faisant endosser à ses successeurs le poids de la faute !

Ouattara dénonçant « la xénophobie » en Côte-d’Ivoire ce serait Sarkozy, demain, stigmatisant charter et karcher en France. Simple imposture. Double forfaiture. Triple révisionnisme !

jeudi 25 octobre 2007

Guy Môquet et la Côte-d'Ivoire*



L'essayiste Séry Bailly revient sur l'affaire Guy Môquet, en débusquant, avec clarté, l'indignation à double vitesse de la France officielle.

"Nul ne peut demander aux fils de se repentir des fautes de leurs pères " disait en juillet Sarkozy. A la lumière de ce théorème, personne, aujourd'hui, n'a à se repentir de la mort de Guy Môquet. Franchement, si ce n'est pas de la...moquerie.
L'essayiste Séry Bailly, nous apporte ici sa part d'éclairage : soyons attentifs.




Guy Môquet est un jeune Français qui a été fusillé le 22 octobre 1941 par les forces allemandes d’occupation. Avant de mourir, il a laissé une lettre à ses parents. Le Président Sarkozy a demandé qu’elle soit lue dans toutes les écoles de France et de Navarre le 22 octobre 2007.

L’événement historique a même donné lieu à un court métrage intitulé «La lettre». L’histoire est un genre surprenant. Par-delà les années, les événements se télescopent. Ce qu’on célèbre là-bas, a un écho ici et vise versa. La vie et la mort de ce jeune résistant français sont émouvantes. Son courage devant la mort, son affection pour sa famille, son appel aux siens, tout cela ne laisse personne indifférent.L’instruction présidentielle a ouvert un débat dans la société française, surtout parmi les enseignants.

L’histoire doit-elle être convoquée par l’Etat ou sont-ce les citoyens qui doivent se l’approprier à volonté ? Et la liberté pédagogique ? Le chef des éducateurs n’est-il pas éducateur en chef ? Et l’éducation citoyenne alors dans tout cet imbroglio ? Il n’est pas facile de préconiser la rupture et de la mettre en œuvre, dans une logique de continuité ! Guy Môquet vient-il se substituer à Jeanne d’Arc ? La France est-elle en panne d’héroïsme et à la recherche de héros ? S’agit-il de couper l’herbe sous les pieds du vieux Le Pen ?

Il est plus commode pour un jeune président de s’identifier à un homme jeune qu’à une jeune femme ! Certains disent que célébrer le jeune résistant, c’est justifier tous ces jeunes banlieusards qui ont mis des villes à feu et à casse. Toutes les luttes sont respectables, mais pas tous les moyens ! Lui avait un projet pour lequel il se battait, eux ont une rage a exprimer. Là un monde à défendre, ici un autre à détruire, même si c’est pour le reconstruire!

La chaîne TV 5 est-elle fière de faire passer le film consacré à ce jeune héros? Certainement ! Peut-elle reconnaître aux autres jeunes du monde entier, ce droit d’agir héroïquement ? Ceux qui disent que Guy Môquet est une «très belle figure de la France», avaient-ils le droit de défigurer les héros des autres ? Les nôtres étaient des désoeuvrés manipulés, des patriotes de Gbagbo acquis à coups de millions de cfa.

Lui, il ne peut être déclaré patriote de Sarkozy. Ce dernier n’était pas encore né. Lui, il demeure un résistant qui savait à quoi il résistait et était sûr des valeurs qu’il défendait. Que le jeune Guy Môquet soit un militant communiste est aussi un coup que nous recevons en pleine gueule ! Voici qu’on célèbre un jeune rouge. Voilà qu’on ne peut tolérer des dirigeants d’un rose parfois si pâle !

Eux ils ont droit à toutes les couleurs pour constituer leur bouquet national. Nous devons nous contenter de celles de la soumission qui sont toujours brunes ou noires et parfois vertes ! Il avait dix sept ans et demi. Moi je me souviens de ce jeune, qui a été blessé pendant les événements de novembre 2004. Il avait treize ans lui. Il n’est pas mort. Mais qui n’a pas dans les oreilles l’écho de ses paroles ?

«Je n’ai rien dit à ma mère sinon elle m’aurait empêché de défendre mon pays !» Qui se souvient du nom de notre petit héros ? Tel est le drame de la mémoire. Elle peut s’éroder même en se figeant dans la pierre des monuments. Il a eu plus de chance que l’autre dont la tête a explosé dans cette histoire sans queue ni tête ! Guy Môquet a su faire face à ses bourreaux, les regarder droit dans les yeux, avant de s’écrouler. Il est tombé complet sur le sol de France. L’autre a été décapité.

Il n’a pas su qui a tiré. Il n’a pas su pourquoi il a tiré sur eux pour l’atteindre lui. Pour la France officielle, ces jeunes n’avaient pas le droit de défendre leur patrie. Ils étaient manipulés. Ils avaient été conditionnés par les chefs patriotes, ces champions de la haine ! Pourtant, chanter la geste de Guy Môquet, ce n’est pas manifester de la haine envers les Allemands. Ce n’est pas retourner le couteau dans la plaie de l’histoire, ni entretenir ou susciter un sentiment anti-allemand.

Prétendre avoir ses héros est une faute grave. C’est un péché d’orgueil car on prétendrait avoir une histoire à faire. Avoir une histoire, c’est avoir une volonté qui se déploie dans le temps. Vouloir avoir des héros, c’est donc vouloir faire son histoire. Or la dépendance, ce n’est rien d’autre que d’être arrimé à l’histoire d’un autre peuple. Le philosophe Hegel l’a déjà dit clairement et ses frères européens l’ont compris tout aussi clairement !

Nous n’avons pas d’histoire car c’est celle des autres qui est venue se dérouler sous nos fenêtres et sur nos plages ! De tous les péchés, il me semble que l’orgueil est le plus sévèrement sanctionné ! Oui, vouloir faire son histoire, ressemble à une imitation de Dieu. C’est vouloir rivaliser avec lui pour être des «créeurs», selon l’expression du chanteur humoriste !Guy Môquet est un modèle que nous revendiquons pour nous aussi.

Dans sa lettre, nous ne voyons aucune rancœur contre ses bourreaux. Il sait seulement qu’il va mourir et il n’en a pas particulièrement peur. Il est prêt dans sa tête. Il sait pourquoi, il sait pour quoi, il sait pour qui il va mourir ! Reconnaître les héros des autres, c’est se donner le droit d’en avoir soi-même ! Tous les bavards qui ont parlé d’une histoire tournée vers l’avenir, ont glosé en fonction de leurs intérêts du moment. Ils auraient tant voulu que les nôtres coïncident avec les leurs !

Certains ont la possibilité d’instrumentaliser le passé en leur faveur et nous n’aurions pas le droit de vivre notre présent, en fonction du futur dont nous rêvons ! Nous aurions demandé qu’on lise dans nos écoles, la lettre de Lumumba à son épouse et à ses enfants, on nous aurait traités de tous les noms. Mais si nous ne l’avons pas fait, ce n’est pas la faute à Sarko.

Guy Môquet était à l’Ivoire ! Des Ivoiriens ont pensé tout bas, «Tant pis pour lui». Il réssuscite en France, des Français protestent dans les allées des lycées pour ne pas emprunter celles de l’histoire d’Etat. Guy Môquet sera sur la liste noire de l’ONU, condamné par la même France qui le loue !

Séry Bailly

(*) le titre est de nous

lundi 15 octobre 2007

Il y a 20 ans, était assassiné Sankara, le témoignage de l'écrivain ivoirien Tiburce Koffi

20 ème anniversaire de l`assassinat deThomas Sankara : Mémoire d`une tombe (1)
lundi 15 octobre 2007


Thomas Sankara a été assassiné le 15 octobre 1983, par un commando de l'armée burkinabé. 20 ans après sa disparition tragique, son nom reste intimement lié à l'histoire de la renaissance de ce pays du Sahel que les austérités climatologiques, ainsi que les politiques impérialistes de l'exploitation capitaliste, condamnaient, certainement, à une pauvreté plus choquante, plus navrante. Quelques notes circonstancielles, aujourd'hui, à l'occasion de ce 20 ème anniversaire de son élimination physique, pour nous rappeler au souvenir d'une figure sympathique de l'histoire des luttes de libération en Afrique ; et, honorer, du coup, la mémoire d'une illustre tombe.
L'histoire de Thomas Sankara et, du coup, celle de la révolution burkinabé qui porte, indiscutablement, les marques de l'utopie tourmentée qui a alimenté le cerveau et l'âme de ce jeune officier iconoclaste, a fait l'objet de plusieurs ouvrages critiques, biographiques ; de compilations, aussi (2). Ce sont des livres bien menés, signés d'auteurs crédibles, parce qu'ils ont suivi les péripéties de cette histoire qui n'en finit pas d'interpeller l'intelligentsia révolutionnaire, africaine.

Qu'il me plaise ici, de dire quelques mots, à propos de cette histoire. Quand, ce quatrième jour du mois d'août 1983, de jeunes officiers de l'armée nationale de la Haute-Volta, prenaient le pouvoir, nul observateur attentif de la scène politique voltaïque, nul spécialiste des questions africaines, et, peut-même, nul médium à la science infaillible, n'aurait pu spéculer, scientifiquement, ni prévoir (en interrogeant les signes du ciel), la suite de ce énième putsch qui venait de se dérouler dans ce pays que d'aucuns se plaisaient à appeler, ironiquement : ''la capitale des coups d'Etats'' en Afrique de l'ouest francophone. Que n'avaient-ils raison, en réalité ?


Et c'est le président Houphouët __ qui avait une phobie, justifiée, des coups de bottes __ qui avait, le mieux, diagnostiqué le mal pernicieux qui ruinait ce pays : au cours d'un Conseil national, il eut, en effet, à parler d'un pays où " le président avait été renversé par le général ; et ce dernier, par le colonel qui, lui, avait été renversé par le commandant que venait de renverser le capitaine ! ".


On n'était pas très loin de voir le capitaine être renversé, un jour, par un lieutenant pour, à la fin, aboutir à une situation où le dernier chef de ce pays serait un soldat de deuxième classe qui aurait renversé le caporal ! Au-delà de l'ironie pessimiste, il faut souligner la leçon essentielle à retenir de cette réflexion du président Houphouët : la dégradation de la symbolique de l'Etat en tant qu'institution sacrée et respectable. Et le pays où venait de se passer cet énième coup d'Etat, n'était plus loin d'être la risée de l'Afrique francophone (s'il ne l'était déjà), tant les putschs s'y succédaient à un rythme alarmant et,… comique !


Pis, ce putsch, de plus et, apparemment, de trop, ne présageait rien d'autres qu'un recul inquiétant de la stabilité, de l'ordre et de la discipline ; bref : de la paix. Autant de notions très chères à un Houphouët - il en avait même fait le fondement de sa politique. Il n'eut pas tort de penser ainsi : les quatre années de règne de ces officiers furent, en effet, des moments de grands bouleversements dans la vie du peuple qu'on appelait alors, les Voltaïques. La révolution sankariste.


C'est que les nouveaux dirigeants avaient placé l'avènement de leur règne sous un signe qui a toujours suscité chez les tenants des pouvoirs et régimes ''stabilistes'', méfiance, crainte et suspicion : la révolution ! Et quelle révolution ! Tout commence, ici, par une création onomastique : le nom Haute-Volta cède, désormais, la place à une nouvelle appellation : Burkina-Faso __ le pays des hommes intègres. Quelle prétention ! Les habitants de ce pays s'appellent, désormais, des… Burkinabè !


Tous ces mots donnent dans l'insolite ; bon nombre d'entre nous ont même du mal à le prononcer, tant leurs sonorités paraissent comiques et rébarbatives, à nos oreilles. Et on n'hésite même pas à lui préférer le nom Haute-Volta, qui était plus rassurant, plus familier et… plus prononçable ! Enfin, le fait (changer le nom du pays) n'était pas nouveau : Mobutu avait transformé le Congo en Zaïre, Kérékou avait fait du Dahomey, le Bénin ; et, bien avant eux, la Gold Coast de Nkrumah fut baptisé Ghana.


Mais ces pays n'étaient guère avancés dans la voie du saut qualitatif qu'inspiraient leurs nouvelles appellations. Du folklore tropical donc ! Comme seuls savent en produire, ces incorrigibles de nègres !Mais, très vite, les choses prennent une autre tournure. Sérieuse, celle-là : la révolution burkinabé se démarque des cultes de célébration de l'Osagiefo qui caractérisèrent le règne ''divin'', bourgeois, élitiste et peu productif, de Nkrumah ; elle se démarqua, plus nettement, des futilités, niaiseries et obscurantismes du régime de Mobutu ; elle se distingua, davantage, de la culture des slogans creux, sans contenu idéologique véritable, qui étaient en vigueur au pays de Mathieu Kérékou…


Celui qui était à la tête de ce mouvement, s'appelait Thomas Sankara. C'était un dialecticien, un artiste, un véritable officier de l'armée, et un passionné de la cause nouvelle : la renaissance des misérables et complexés voltaïques d'hier à une nation nouvelle, sous le sceau de valeurs qualifiantes et honorifiques : la droiture morale, la fureur de vaincre, le goût de l'effort, du travail, du mérite ; et, par-dessus tout, l'amour (non négociable) du pays : " La patrie ou la mort ! ", disait le nouveau slogan, inspiré de la révolution castro- guevariste.


Et ce slogan exaltait les cœurs des jeunes…Imitation, originalité et téméritéDe tous les chefs d'Etats africains (en tout cas ceux de l'Afrique de l'Ouest) qui se réclamaient de la révolution, seuls Nkrumah (3) __ du fait de la vaste érudition de type universitaire de ce dernier __ et Thomas Sankara, avaient les outils conceptuels de l'action révolutionnaire. Sankara n'a, certes, pas lu entièrement Le Capital (qui a d'ailleurs lu, entièrement, cet immense texte ?) ; mais, il avait, au moins, lu et relu Le manifeste du parti communiste et Le bilan de la révolution cubaine.


Il avait aussi, et surtout, lu et assimilé L'Etat et la révolution (Lénine). Ce dernier livre était d'ailleurs son livre de chevet. Le " Discours d'orientation " qu'il prononce, le 2 octobre 1983, au nom du CNR (Conseil national de la révolution), porte les marques de ces lectures et cette culture ''révolutionnaire''. C'est un texte d'une vingtaine de pages (en format livre) où Sankara se livre à une analyse dialectique des contradictions de classes qui orchestraient jusque là, (avant la révolution) le mouvement de la société voltaïque.


Il débouche sur la légitimation de la solution radicale qu'impose la révolution en tant que bouleversement total et violent des structures traditionnelles de pensée : " La révolution d'août arrive, par conséquent, comme la solution des contradictions sociales qui ne pouvaient désormais être étouffées par des solutions de compromis (4) ". Toute la légitimation et la justification du caractère répressif de la praxis ''révolutionnaire'' se trouvent dans ces lignes.La classification sociale (de la société voltaïque) à laquelle il se livre, n'est rien d'autre qu'un replâtrage des thèses et analyses que Lénine à produites sur la société féodale russe d'avant la révolution d'octobre 1917.


A la relecture de ce texte (qui m'avait fortement enthousiasmé et impressionné à l'époque), je me demande, aujourd'hui, comment un dirigeant africain de pays en dessous même du sous-développement, en est-il arrivé à ''servir'' à son peuple (un peuple de non alphabétisés et peu instruit de ces questions d'une réelle aridité conceptuelle et philosophique), un tel discours, absolument irréaliste et inadapté au contexte sociologique et historique-cible. Ah, jeunesse !!!Dans ce discours ''historique'', Sankara parle, s'agissant de la société voltaïque, de la bourgeoisie compador, de la bourgeoisie d'Etat, de la classe ouvrière voltaïque (combien d'industries et de quelle nature, existait-il en Haute-Volta, pour qu'on parle de masses ouvrières voltaïques, locales ?!) ; enfin, du lumpen-prolétariat. Qui avait, vraiment, compris, ce discours ?


C'est, cependant, un discours de forte teneur idéologique, retransmis par la télévision, et qui va orienter, DIRIGER, effectivement, le vécu social et politique des Burkinabè… En quatre années de règne, les jeunes officiers dirigeants du Conseil national de la révolution (CNR), vont imprimer un dynamisme exemplaire à leur pays : tous les secteurs de la production sont, sans cesse alertés. Le Burkina Faso devient alors, un immense chantier à ciel ouvert : constructions de salles de classes, de centres de santé, tracés et aménagements de routes, politique d'hygiène, etc., tout cela, soutenu et mis en mouvement par une propagande et une pression idéologiques qui ne furent pas sans nous rappeler le contexte policé de la révolution cubaine.


Les nouveaux leaders, surtout leur porte-parole, le capitaine Thomas Sankara, ne s'en cachent d'ailleurs pas (4)…La création des CDR (en référence à ceux de Cuba) et des Tribunaux populaires (inspirés de Che Guevara), le discours, téméraire (à la limite de l'outrage à l'ordre ancien), la permanence des militaires dans le vécu quotidien du peuple nouveau, les jugements sommaires, la répression sans appel de l'intelligentsia critique, les slogans tapageurs et ravageurs, les prises de positions officielles (tranchées, sans nuance et, surtout, sans égard aux chefs d'Etat environnants non membres de la ligne de front), etc., tout, ici, se présente comme une copie de la révolution cubaine.


Mais c'était, surtout, un climat de forte pression psychologique ; un climat de déclarations démagogiques, spectaculaires, certes, mais inutilement provocateurs et inefficaces… Il y a tant de choses à dire sur Thomas Sankara. Tant de choses… belles, comme mauvaises ! Brûlons cependant les étapes, pour les nécessités d'un article de journal.Fin de l'histoire et début de la légendeDes dissensions sournoises fissurent, entre-temps, et progressivement, le mur du CNR.


Les exactions des CDR, les jugements sommaires rendus par les Tribunaux populaires, le climat de répression policière, l'hostilité grandissante de nombreux chefs d'Etat que commençaient à exaspérer les outrances verbales du jeune et présomptueux révolutionnaire, etc., tout cela finit par atteindre un seuil de contradictions impossibles à gérer… Le soir du 15 octobre 1987, la nouvelle grave parvint aux oreilles du monde entier, stupéfié : Thomas Sankara, ainsi que 12 de ses collaborateurs, viennent d'être assassinés par un détachement militaire, à l'issue d'un putsch.


Le nouvel homme fort du pays des hommes intègres ( ?) s'appelle Blaise Compaoré. Il était le second du régime. L'homme de confiance du capitaine Thomas Sankara. Et, ceux des habitants du pays des hommes intègres, qui avaient de la mémoire, se souvinrent que l'officier au cœur pur et aux rêves de grandeur pour le pays, avait dit un jour que, seul Blaise Compaoré, son compagnon d'armes, son homme de confiance et son ami-frère, pouvait le tuer, si l'envie de le faire le prenait. Et il en fut, peut-être, ainsi !


Peut-être… Deux années après, exactement le 19 septembre 1989 étaient exécutés les commandants Jean-Baptiste Lingani et Henri Zongo. Des 4 compagnons d’armes de la révolution du 4 août 1983, il ne restera plus qu’un seul: Blaise Compaoré. Une fois de plus la révolution avait mangé ses propres enfants. C’est une vieille chanson. Il s'appelle Isidore-Noël Thomas Sankara. La jeunesse de son pays l'appelait, affectueusement : Tom Sank. Il est né le 21 décembre 1949 à Yako (Pitié, en baoulé !).


Il est arrivé au pouvoir, dans un pays d'Afrique qui s'appelait la Haute-Volta, le 04 août 1983. Il a changé le nom de ce pays, et l'a baptisé de celui de Burkina-Faso - le pays des hommes intègres. Le 15 octobre 1987, il a été assassiné, à l'issue d'un putsch. Voilà ce que dit de lui, l'histoire objective. Il était le fils du soleil et de la pluie avare du Sahel. Il était un quêteur d'aubes nouvelles, le prophète et l'artisan de la renaissance d'un petit pays qui, naguère, grelottait de honte et de nudité scandaleuse.


Une nuit tombante, des dévoreurs d'âmes l'ont précipité dans le royaume souterrain où trônent, superbes et de grandeur immaculée, les immortels de l'Histoire ! Ainsi, dira de lui, le conteur habile d'un soir de souvenirs lancinants. L'histoire de Sankara est finie. Vive sa légende !


Tiburce KoffiEcrivain, ex-membre du club sankariste de Ouaga.
tiburce__koffi@yahoo.frTél. (00225) 01-05-40-43.


Notes : 1 / " Mémoire d'une tombe ", un roman de Tiburce koffi, en hommage à la révolution sankariste. La sortie de ce livre, prévue pour ce lundi 15 octobre, a été différée.
2 / Voir, notamment : " Sankara le rebelle " de Sennen Andriamirado, " Thomas Sankara : Oser inventer l'avenir ", présenté par David Gakunzi, " Les années sankara ", de Bruno Jaffré, " Thomas Sankara, l'espoir assassiné " de Valère D. Somé, etc.
3/ Lire " La lutte des classes en afrique ".
4/ Discours d'orientation politique, 02 octobre 1983.
5/ Le 08 octobre 1983, Camillo Guevara, le fils du Che, est ainsi reçu, en grand pompe, à Ouagadougou, dans le cadre d'une exposition en commémoration du 20 ème anniversaire de l'assassinat de Che Guevara. Le discours prononcé à cette occasion fut le dernier de Thomas Sankara.


Pendant ce temps, le RDR de Alassane Ouatarra commémore l'arrivée au pouvoir de Blaise Compaoré, ce même lundi du 15 octobre, rapporte le quotidien ivoirien "Le Nouveau Réveil".


20ème anniversaire de Compaoré au pouvoir : Une délégation du RDR au Burkina
lundi 15 octobre 2007

Madame le Professeur Henriette Dagri-Diabaté, Secrétaire Général du Rassemblement des Républicains (RDR) a quitté à Abidjan ce matin pour Ouagadougou la capitale du Burkina Faso, où elle représentera du 14 au 16 Octobre 2007, le Premier Ministre Alassane Dramane OUATTARA, Président du RDR, invité à la cérémonie de commémoration du 20ème anniversaire de l'accession au pouvoir de SEM Blaise COMPAORE, Président du Faso. Madame le Secrétaire Général du RDR est à la tête d'une importante délégation du Parti comprenant notamment :-Monsieur Amadou Gon COULIBALY Secrétaire Général Délégué ;-Monsieur Amadou SOUMAHORO Secrétaire Général Adjoint Chargé des Affaires Politiques ;-Madame Camara Kandia, Secrétaire Général Adjoint chargé de l'Animation, de la Formation et de la Solidarité, Porte Parole Adjoint ;-Monsieur le Professeur Hyacinthe SARASSORO, Vice Président du Conseil Politique ;-Monsieur le Professeur SIDIBE Valy Secrétaire National à la Formation;-Monsieur KARAMOKO Yayoro, Président du Rassemblement des Jeunes Républicains (RJR). Madame le Professeur DAGRI-DIABATE participera également au Colloque International:"Démocratie et Développement", organisé par le Congrès pour la Démocratie et le Progrès (CDP) à l'occasion de cette cérémonie de commémoration.Enfin, Madame Henriette DAGRI-DIABATE mettra à profit son séjour pour rencontrer les autorités du Burkina Faso et les responsables du CDP avant de regagner Abidjan.


Fait à Abidjan le 14 Octobre 2007
Pour la cellule de Communication Amadou Coulibaly
Conseiller en Communication